Dans Grandia (seul J-RPG auquel Child Of Light fait ouvertement référence via les combats), il y a des moments qui m'ont touchés.A l'époque, le titre culte de Game Arts ne me semblait pourtant pas avoir été fait dans le but de toucher le joueur à tout prix. C'était une ode à la grande aventure dotée d'excellents systèmes de jeu et d'une histoire prenante, mais quand l'émotion pointait son nez, elle me semblait naturelle, jamais ''calculée'' (et pourtant ça devait bien être le cas).
Child of Light m'a fait l'effet inverse, tout m'y semble trop calibrer, trop parfait. D'emblée, avant même que le jeu ne sorte, les développeurs annoncent la couleur; des mots-clé sont lâchés : «Poésie», «Hommage», «Artistique», «Originalité»....
On veut toucher le coeur du joueur.
La batterie de moyens déployée suit la même logique : on opte pour une esthétique 'livre pour enfants fait à la main', on fait appel à une artiste reconnue pour la bande-son, on cite des J-RPGs légendaires comme source d'inspiration, et on précise la présence d'un budget plus faible que les AAA comme si c'était une sorte de garantie.
Il est indéniable qu'un boulot immense a été abattu sur l'aspect visuel de CoL, c'est très joli mais ça ne m'a pas embarqué. Un peu comme si je feuilletais un art-book, c'est tout.
Même constat pour la musique au demeurant sympathique. A part les musiques de combats de boss, les autres thèmes (en particulier la mélodie jouée au piano) sont répétés tout le long du jeu au point d'en devenir agaçants surtout qu'ils ne sont pas particulièrement mémorables.
J'ai bien conscience que c'est une appréciation très subjective et que d'autres s'immergeront sans problème dans le monde de Lemuria.
Mais c'est quand on se penche sur le gameplay que les choses se gâtent. Déjà, CoL n'a rien d'un J-RPG pour moi. Il repompe de manière simplifié les combats de Grandia, mais tout le reste sont des mécaniques classiques du RPG en général, voire du jeu d'action-aventure. Les composantes équipements-stats-loot-leveling sont très légères pour ne pas dire inconsistantes. La faute à un challenge peu relevé qui n'oblige pas à exploiter à fond les différents systèmes déjà assez basiques.
La bascule en mode hard arrange un peu les choses, surtout pour les boss, où on se sent enfin impliqué, mais ça ne transfigure pas le jeu pour autant contrairement à certaines grandes productions d'Atlus, Tri-Ace et autres où le loot ou le leveling sont déjà des sources de plaisir en soi.
Le level-design est plat et répétitif, on virevolte dans les niveaux, avec quelques pièges et énigmes classiques posés ça et là.
Le rythme et le scénario sont lents voire laborieux et dénués selon moi de toute empathie envers les personnages. Le choix d'un script uniquement en vers est certes ''arty'' mais bonjour le manque d'immersion. Des dialogues classiques et bien écrits auraient, pour moi, été bien plus avantageux pour la caractérisation des persos.
Et surtout, il manque ces moments cultes, ces pics d'intensité dramatiques, qui font que des années après, on se souvient encore de passages entiers d'un FF, Chrono, DQ et tant d'autres.
Pourtant, sur le coup, j'ai parcouru Col sans trop crier au scandale car la solidité de production est là, l'ergonomie est soignée, le visuel maintient éveillé et tout est fait pour que l'on ne bloque pas.
Et c'est bien là le problème, car sur le fond, ce jeu sensé être «différent» est un copier-coller du cahier des charges des grosses productions Ubisoft : accessibilité à tout prix, peu de profondeur de jeu, des trucs à ramasser / collectionner un peu partout histoire de rendre l'univers moins vide, level-design et rythme à bout de souffle au bout de 4h (heureusement le jeu est court).
On pourra donc se laisser tenter pour le visuel (selon les goûts), pour se rappeler à quel point le Battle System des Grandia était excellent ou pour encourager Ubisoft d'exploiter autre chose que des univers militaires et/ou Hollywoodiens.
Je m'attendais à quelque chose que j'allais adorer ou détester, mais la vérité c'est que CoL ne m'a fait ni chaud, ni froid. Rien n'est foncièrement raté, mais rien n'y est particulièrement marquant non plus.
Messieurs d'Ubisoft, votre cahier des charges est rodé mais il serait temps de remettre des cojones sur la table question gameplay.
Car comme on dit, « à vaincre sans périls, on triomphe sans gloire».